Procès-verbal of Jean Gratiolet, Alençon herald, sent by King Louis XIII of France to Cardinal-Infant Ferdinand to declare war. (Last declaration of war made by French herald.) (1635)
About the text
The following text is taken from Recueil de toutes les Gazettes, nouvelles Ordinaires & extraordinaires & autres Relations, année 1635, 1636, pp.285-8 (gallica). I corrected typographical errors due to the OCR system misrecognition, but there may still exist such errors. Please consult printed version for academic purpose.
The same document is also published in Le Mercvre François, tome 20 (1634-1635), 1647,
pp.928ff. (Google Books), as mentioned in Parry 2005, p.99 n.186; and
Léonard, Frédéric, Recueil Des Traitez De Paix, tome 6, 1693, pp.2-4 (Google Books). These two edition differ in orthography with Recueil and also differ in between them. They lack the last paragraph, and mentions the herald's habit instead.
Another copy is cited in Poullain de Saint-Foix, Germain-François, Essais historiques sur Paris, tome 4, 17765, pp.61-69 (Google Books). The author states that he had copied from the manuscript in the royal Bibliothèque, and although we can say the story is the same between the original(?) manuscript and the published Gazette, the choosing of words is slightly different. (Orthography is, of course, different.)
A summarized translation of this account into English with a discussion on declaration of war by heralds can be found in: Lesaffer, Randall, "Defensive Warfare, Prevention and Hegemony. The Justifications for the Franco-Spanish War of 1635", Part I, in: Journal of the History of International Law, Vol. 8, 2006, pp. 1-5. (pdf) (Part II.) (The whole article is also available at Defensive Warfare, Prevention and Hegemony: The Justifications for the Franco-Spanish War of 1635 by Randall Lesaffer :: SSRN.)
Instruction to the herald with notes (including brief biography of the herald) is published in Avenel, Denis Louis Martial (ed.), Lettres, instructions diplomatiques et papiers d'état du cardinal de Richelieu, tome 4, Paris, 1861, pp.760-5 (Google Books).
The English would have possibly known this event soon; see Knowler, William (ed.), The Earl of Strafforde's letters and dispatches: with an essay towards his life, vol. 1, 1739, p. 429. The letter being dated June 1st.
There is mention to Gratiol[l]et in the entry of the family AUBAS de FÉROU et de GRATIOLLET (d'), in Chaix d'Est-Ange, Gustave, Dictionnaire des familles françaises anciennes ou notables à la fin du XIXe siècle, Évreux: Charles Hérissey, vol.15, 1917, pp.410ff. (gallica.) He was possibly living 1652 [Andrieu, Jules, Histoire de l'Agenais, Paris: A. Picard and Agen: Ferran, vol.2, 1893,
p.173 n.5; here's vol.1 (both Internet Archive)]. His tenure must have ended long before that, since the office had been occupied by another person by 1641 as mentioned by the incumbents' list for that year [Wages, 1553, 1631-3, 1641].
Two years before, King Louis XIII sent Samson (or Sanson) Le Page (or Lepage), premier héraut d'armes de France au titre de Bourgogne to Alger. He was a homme qui sçait également bien, et la langue et les affaires de Turquie. See Grammont, Henri Delmas de, Relations entre la France et la Régence d'Alger au XVIIe siècle. Troisième partie. La Mission de Sanson Le Page et les agents intérimaires (1634-1646), Alger: Adolphe Jourdan, 1880 (Gallica) and Dan, Pierre, Histoire de Barbarie et de ses corsaires, Paris: Pierre Rocolet, 16492, p.41 (Google Books). I am not sure, however, if he was dispatched in his heraldic capacity.
Seven years before, Hector Le Breton, Montjoye King of Arms made a similar summons against La Rochelle. His procès-verbal is published in Le Mercure françois, vol.14, 1627-28, pp.652ff. (Google Books.)
In 1625, when the Constable made summons agains Genoa, he sent a herald to the city:
Puis Monseigneur le Connestable
enuoya vn Heraut à Messueurs
de Gennes pour les sommer
& enioindre, ... [La Sommation de la ville et seigneurie de Gennes, faicte par monseigneur le
connestable. Ensemble ce qui s'est passé à la Valtoline par l'armee du Roy,
commandee par Monsieur le marquis de Coeuvre, Paris: Iean Martin, 1625, pp.4-5. (pdf.)]
In 1621, Jean [de] Pinguis, Champagne herald made a similar summons against M. de Soubise (Benjamin de Rohan). See Le Mercure françois, vol.7, 1621, pp.525ff., Bernard, Charles, Histoire du roy Louis XIII, Paris: Augustin Courbe, 1646, pp.238ff. (Google Books) and
Calames : Ms 3046 « Procès-verbal de la sommation faicte à Mr [Benjamin de Rohan, seigneur] de Soubize, estant dans Saint Jean d'Angely, par le herault [Jean] de Pinguis », d'avoir à rendre la place au Roi ; 3 juin 1625 (1625...?).
He had been Champagne since 1610.
(However, in a manuscript his title is Bourbon:
Jean de Pinguis [?] , sieur dardene [?] herault
darmes du Roy au tiltre de Bourbon... [Paris, bnf, ms. Français 6557,
« Sommation faicte... à Mr de Soubize, estant dans la ville de St-Jean-d'Angeli, à ce qu'il eust à ouvrir les portes de la dicte ville au Roy, » juin 1621, f89r].)
On 12 Feb. 1616, King Louis XIII sent a Herald of arms to the Duke of Vendôme for summons [Malingre, Claude,
Histoire générale des guerres et mouvemens arrivez en divers Estats du monde sous le règne auguste de Louys XIII, roy de France et de Navarre: depuis l'an 1610 jusqu'à l'an 1620, tome 1, Rouen: Jacques Caillové, 1647,
pp.262-3. (Google Books)].
Note
Seventeenth century French orthography uses tilde sign which is now obsolete; e.g.: tãt < tant, prẽdre < prendre, déclaratiõ < déclaration. May be not displayed correctly.
The text
No. 72.
EXTRAORDINAIRE
DV XXVIII. MAI M. DC. XXXV.
Contenant la lettre du Mareschal de la Force, escrite du Camp
d'Ericourt le 18. Mai 1635. touchant la nouvelle défaite des
Lorrains. Et le procez verbal du Heraut envoyé par le Roy
au Cardinal Infant lui dénoncer la guerre.
(snip.)
Procez verbal du Heraut envoyè [sic] par le Roy au Cardinal Infant
lui dénoncer la guerre.
IEAN GRATIOLET commis à la charge de Heraut d'ar-
mes de France sous le titre d'Alençon, suivant la commission
donnée à S. Quentin sous le seel secret le 12. du present mois
de Mai 1635. Signée LOVIS; & plus bas, Par le Roy, SERVIENT:
& en vertu d'icelle ie certifie à tous qu'il appartiendra, estre
parti de Neufchastel sur Aine le 16. desdits mois & an; & m'estre
acheminé au Pais-bas pour trouver le Cardinal Infant d'Espa-
gne: & ayant appris qu'il estoit à Bruxelles, je me suis rendu le
19. du present mois à la porte de ladite ville, appellée la porte
de Hau, sur les neuf heures du matin, accompagné de Gratian
Ellissavide Trompette ordinaire du Roy: & ayant pris ma cotte
d'Armes au titre d'Alençon, la toque & le baston en telle action
requis; je me suis arresté environ deux cens pas de la porte:
ledit Trompette estant allé fort proche d'icelle, & fait les cha-
mades à la maniere accoustumée. Où ayant veu 4 ou 5. hom-
mes qui faisoient la garde à ladite porte, il se seroit addressé à
vn d'iceux: lui disant qu'il conduisoit vn Heraut d'armes du
Roy son Maistre vers le Cardinal Infant d'Espagne. Cet hom-
me ayant esté parler au Sergent Maior de ladite ville, & lui ve-
nu me trouver, je l'asseurai que i'estoye venu pour parler audit
Cardinal Infant. Lors ledit Maior s'en retourna dans la ville
avertir ledit Cardinal de mon arrivée: & estant revenu sur les
douze heures, il me dist que le Prince avoit promis de me don-
ner audiance, & l'avoit chargé de me mener chez lui en atten-
dant l'heure qu'il me la pourroit donner: ledit Sergent Maior
me priant à cette fin de vouloir entrer dans la ville sans l'habil-
lement de Heraut, lequel je lui declarai ne pouvoir quitter. Il
avoit avec lui le Roy des Herauts d'armes du Païs-bas [sic, there is an inconsitency.], & son
titre de la Toison d'or*1. Estant arrivé en leur compagnie au lo-
gis dudit Maior sur la place du Sablon, icelui Maior s'en retour-
na au Palais du Prince pour prendre l'heure que je pourroie
estre mené devant lui; d'où il ne revint qu'à 2. heures apres midi
pour m'asseurer que ie serois oüy dudit Prince; mais qu'il estoit
empesché au Conseil pour son partement, qui feroit sur les 4.
heures, pour aller coucher à Louvain: quoi que tãt ledit Sergent
Maior, que Roy des Herauts d'Armes m'eussent asseuré avec
plusieurs autres personnes que ledit Cardinal Infant ne devoir
partir que lundi 21: parce que son Altesse devoit voir vne pro-
cession generale qui se faittous les ans à pareil iour dans ladite
ville de Bruxelles; & qu'il devoit ce iour là disner à la maison de
ville. Voyant ces longueurs, ie pressee le Maior de me dire si ie
devoye esperer ou non d'estre oüy dudit Cardinal Infant: &
m'ayant asseuré que oüy: il retourna pour la troisiesme fois au
Palais dudit Cardinal, pour en apprendre précizement l'heure.
Cependant il vint d'autres Herauts dans le logis où i'estoye:
l'vn du titre du Hainaut*2 & l'autre de Gueldres*3, qui dirent que
l'Infant estoit allé dire Adieu à la Reine Mere: & neantmoins
le Roy desdits Herauts me confirma derechef que je seroye oüi
dudit Infant à son retour. Et m'ayant tenu plusieurs discours sur
la couleur de ma cotte d'armes, & sur la façon que ie me tien-
drois parlant audit Infant; A quoi ie leur respondis qu'ils me
fissent dépescher promptement, qu'ils demeureroient satisfaits
de leur curiosité. Sur les six heures apres midi ledit Major re-
vint avec vn homme envoyé pour me demander si j'avoye let-
tre, ou autre papier pour donner à leur Prince. Ie lui dis avoir
respondu à cette demande qu'on m'avoit faite dés le matin. Et
continüant de m'interroger si j'avoye bonne commission pour
parler audit Prince, qu'il la falloit monstrer: je respons que ma
commission estoit ce que ie devoye dire, & que je ne la pou-
voye montrer qu'en parlant audit Cardinal Infant. En suite, il
m'a demandé si j'avoye vn émail marque de ma charge, & si j'a-
voye observé les formalitez entrant dans le Païs-Bas. Ie dis à
tout cela que puis qu'on m'avoit empesché de parler au Cardi-
nal Infant par tant de remises, je luy alloye montrer l'effet de
mon pouvoir. Lors tirant de ma pochette la déclaration que je
devoye faire audit Infant pour la lui bailler: il dist n'avoir char-
ge de rien prẽdre, & s'en fuït. Le Major s'évada aussi d'vn autre
costé. Ie sors donc du logis avec les trois Herauts susdits, &
estant remonté à cheval, je leur dis qu'ils receussent ladite
déclaration. Ils me respondirent qu'ils ne pouvoient: me
prians d'attendre encor vn peu, & que ces Messeurs revien-
droient.
Mais sept heures estans sonnées sans qu'ils retournassent
je dis aux Herauts, tenant en mes mains ledit papier, que c'e-
stoit la déclaratiõ que je devoye faire de la part du Roy mon
Maistre au Cardinal Infant d'Espagne, & iettai ladite déclaratiõ
à leurs pieds devant le logis dudit Sergent Major, sur la place
du Sablon. Lors lesdits Herauts se mirent à crier à la multitu-
de du peuple qui estoit là assemblée, qu'ils ne touchassent
point ce papier. Le contenu d'icelui estoit tel.
Le Heraut d'Armes de France au titre d'Alençon sous-si
gné, certifie à tous qu'il appartiendra, estre venu au Païs-bas
pour trouver le Cardinal Infant d'Espagne de la part du Roy
son Maistre son vnique & souverain Seigneur; pour lui dire,
Puis que Vous n'avez pas voulu rendre la liberté à Monsieur
l'Archeuesque de Tréves Electeur de l'Empire, qui s'estoit mìs
sous la protection de Majesté lors qu'il ne la pouvoit rece-
voir de l'Empereur ny d'aucun autre Prince: & que con-
tre la dignité de l'Empire & le droict des gens vous retenez
prisonnier vn Prince souverain qui n'avoit point de guerre
contre vous: Sa Majesté vous declare qu'elle est resoluë de ti-
rer raison par les armes de cette offense, qui ìnteresse tous les
Princes de la Chrestienté
Et soudain apres avoir jetté ladite Déclaration, j'ay traver-
sé parmi la foule du peuple ladite place du Sablon: & passant
dans la grand'ruë, je suis sorty par la susdite porte de Hau pour
me retirer en France.
Et continuant madite Commission, estant arrivé le 21. des
presens mois & an sur la frontiére dudit Païs-Bas, sur les neuf
heures du matin au village appellé Roüilli, ayant vn posteau à
la main: je l'ai planté environ cent pas proche de l'Eglise, sur
le grand chemin d'Avennes à la Capelle du costé d'Estreu-le
Cauchi, autre village dudit Païs-bas: auquel posteau j'ai atta-
ché autant de ladite déclaration: & ayant rencontre vn païsan
qui sortoit de l'Eglise; je lui ai certifié que j'avoye attaché ledit
placard de la part du Roy mon Maistre contre l'Infant Cardi-
nal d'Espagne, & qu'il eust à en avertir le Mayeur ou quelque
autre Magistrat du lieu. Et le païsan ayant appellé ledit
Mayeur, & me l'ayant montré je lui ai fait la mesme certifica-
tion. Et l'ai veu avec autres personnes s'acheminer vers ledit
posteau: le susdit Elissavide Trompette ordinaire du Roy
faisant cependant les chamades accoutumées. Ce que nous
certifions veritable sous nos seins, les iours & an susdits. Et
a esté par nous rapporté au Roy à Chasteau-Thierri le 23. des-
dits mois & an.
Les rieux dirent, voyans les fuites & tergiversations des
Officiers du Cardinal Infant, auquel cette sommation fit ha-
ster son depart de Bruxelles, l'ayant fait partir des le iour mes-
me pour Diest, que ce premier défaut aux Ordonnances de Iu-
stice estoit vne mauvaise procédure pour gagner sa cause.
Du Bureau d'Adresse, au grand Coq, ruë de la Calandre, pres le
Palais à Paris, le 28. Mai 1635. Avec Privilege.
- *1
- Jean Hervart. Created Toison d'or 19 Nov. 1612. D. 22 June, 1635 (just after this event). La Toison d'Or, ou Recueil des Statuts de l'Ordre de la Toison d'Or, 1689, pp.206-7 (Google Books). Ceballos-Escalera y Gila says his creation was in 1611 (Ceballos-Escalera y Gila 1993, p. 285).
- *2
- Juan de Lincenick, also called Juan de Luxembourg. Created Herald of Hainaut, 20 May 1628. D. 1646. Ceballos-Escalera y Gila 1993, p. 292.
- *3
- Pierre Wauthiers? Butkens, Christophe, Supplement aux trophées tant sacrées que profanes du Duché de Brabant, tome 2, La Haye: Chretien van Lom, 1726, livre 5, Sig.****379. Ceballos-Escalera y Gila says that David Marselaer died in 22 Dec. 1629 and that Wauthiers seems to have died in around 1652 (Ceballos-Escalera y Gila 1993, p. 292).
The event as seen by the other side
About the text
The following text is taken from Piette, Amédée,
"Déclaration de la guerre dite de 30 ans (1635)", in
Bulletin de la Société historique et archéologique de Soissons, 2me série, t. 10, 1879,
pp.35ff. (Google Books.)
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The text
DÉCLARATION DE LA GUERRE
dite de 30 ans
(1635)
La déclaration de guerre d'une nation à une autre
est un acte public d'une telle gravité, que dès les
temps les plus reculés, on s'est plu à l'environner
d'une certaine solennité. Chez tous les peuples civilisés,
il y avait des personnages spéciaux qui, sous différents
titres, étaient chargés de notifier les décisions
de ce genre, et jouissaient de privilèges plus ou moins
étendus pour l'exercice de leur charge.
Chez les Romains, l'officier public chargé de déclarer
la guerre au nom de son pays, était désigné
sous le nom de féciale et ce n'était qu'après trois sommations
faites sur la frontière et après l'invocation des
dieux, qu'il se déterminait à lancer une javeline sur le
territoire ennemi, comme symbole des premières hostilités.
Dans les temps plus rapprochés de nous, chez les
nations européennes et particulièrement en France,
on se servait pour déclarer la guerre, d'un personnage
appelé héraut et quelquefois héraut d'armes,
auquel on appliquait une désignation nobiliaire, avec
les armoiries qui la distinguait.
Aujourd'hui, dans notre temps de haute civilisation,
nous avons simplifié les choses, les gouvernements
pour justifier leurs déclarations de guerre, se contentent
d'exposer leurs griefs dans un manifeste et c'est alors
à laquelle des deux nations se jettera la première sur
l'autre pour s'entredévorer à la façon des bêtes férocés.
Mais ce n'est pas des féciaux, ni des hérauts, ni
des diverses façons de déclarer la guerre autrefois,
que j'ai l'intention de vous entretenir. Je veux seulement
vous faire connaître dans quelles circonstances
et à quelle époque on se servit des hérauts pour la
dernière fois en France : les incidents dont fut marquée
leur dernière mission ne manquent pas d'une
certaine originalité et méritent d'autant mieux d'être
rapportés ici, qu'ils sont peu connus.
Vous trouverez aussi, Messieurs, dans ma communication,
un peu du parfum de l'histoire locale puisque
c'est sur les confins même du département que la
guerre a été déclarée et que celui qui l'a dénoncée était
un habitant de Neuchatel-sur-Aisne.
Dans le commencement de l'année 1635, au milieu
des intrigues et des conspirations qui se formaient,
sans cesse contre Richelieu, ce ministre habile et redouté,
n'en poursuivait pas avec moins d'ardeur la
tâche qu'il s'était imposée, d'abattre la puissance de la
maison d'Autriche, il cherchait et méditait de nouvelles
entreprises pour arriver à ses fins, lorsque la conduite
des Espagnols et surtout les mauvais traitements qu'ils
firent subir à l'électeur de Trèves, allié de la France,
lui fournirent l'occasion qu'il attendait. Au
mois de mars [sic] 1635, il envoya à Bruxelles, un héraut
pour déclarer la guerre au cardinal Infant, gouverneur
des Pays-Bas, ce messager de guerre se nommait
Graciolet, il était de Neuchatel-sur-Aisne (1). On l'avait
(1) Histoire du diocèse de Laon par D, Lelong, p. 490.
qualifié du titre d'Alençon dont il portait les armes
sur ses habits et sur son manteau. Jean Graciolet
partit de Neuchatel le 9 mai 1635, accompagné seulement
d'un trompette, il passa au pied de la montagne
de Laon, évitant d'entrer dans la ville parce que la
peste y sévissait avec intensité (1) et arriva le 19 à
Bruxelles. Dès le lendemain il se présenta au palais
du cardinal, mais à l'aspect d'un personnage, sans
suite, qui n'était porteur d'aucun titre officiel et qui
n'avait pour justifier sa qualité que l'étrangeté de son
costume, la susceptibilité espagnole se trouva blessée,
les officiers du prince refusèrent de reconnaître en lui
un envoyé du roi de France et lui interdirent l'accès du
palais, affectant de ne le considérer que comme un
simple héraut d'armes, c'est-à-dire comme un de ces
fonctionnaires qui, en France et en Angleterre, sont
spécialement chargés de ce qui concernent les honneurs
à rendre, en règlent les formalités, les usages,
président à leur exécution et qui, en raison de la nature
de leurs fonctions, sont obligés d'avoir quelques
notions de l'art héraldique. Le prince informé lui-même
de la présence de ce singulier ambassadeur, affecta
comme ses courtisans de ne voir en lui qu'un
simple héraut d'armes et désigna un savant de Bruxelles
pour le recevoir et l'examiner.
Nous empruntons le récit de cette entrevue [-vne should be a typo] à celui
qu'en a donné le savant jésuite Jules Chifflet, dans un
mémoire écrit en latin sur le siège et la délivrance de
la ville de Saint-Omer (2), mieux que l'analyse la
plus scrupuleuse, il nous en fera connaître les détails
curieux.
(1) Mémoires manuscrits sur le Laonnois, par C. Leleu, tome II, p 599.
[About the book, see
Melleville, Maximilien,
Histoire de la ville de Laon et de ses institutions, t.1,
Laon: Imprimerie du Journal de l'Aisne, Paris: Dumoulin, 1846,
Préface, p.x. (Google Books.)]
(2) Julii Chiffletii. Audomarum obessum et liberatum, anno MDCXXXVII,
Autuerpiae [Aut-: sic] ex-officina Plantiniana Balthasaris Moreti MDCXL. [See
Inventarios y Bibliotecas del Siglo de Oro - Ficha de entrada:
Registro: Audomarum obessum, & liberatum, anno 1638 ab Ioan. [eh?] Chifletio, Antuerp. 1646.
Inventario: Ramírez de Prado, Lorenzo (1662)
Clave: RP-II, 226]
« On sait, dit-il, le respect des Français pour les
traités ; dans la trente-cinquième année de ce siècle,
l'ennemi de la paix commença à les tourmenter, ils
préférèrent à leur propre tranquillité l'avantage de
décimer les populations et de ruiner les villes.
« Avant toutefois de se déclarer et pour mettre de
leur côté le respect apparent des règles, ils envoyèrent
comme héraut d'armes un individu nommé Jean
Graciolet qui, suivant la coutume observée par nos
prédécesseurs, signifiât la guerre au nom du roi de
France. Ce Graciolet, un manteau jeté sur ses épaules,
portant le chapeau à plis serrés, arrondi par le haut,
ne s'arrêta point comme on faisait anciennement sur
la frontière du royaume, mais se rendit tout droit à
Bruxelles. Les courtisans étonnés de cette démarche
inusitée, ne connaissant guère que par les images les
hérauts d'armes, surtout employés dans les relations
des princes entre eux, commencèrent à s'informer de
ce qu'était ce personnage. Ferdinand, infant d'Espagne,
fit venir lui-même un homme expert et érudit
dans la science héraldique et lui ordonna de s'entretenir
avec ledit Graciolet sur quelques parties de cette
science, afin de s'assurer de la condition et de la capacité
du prétendu héraut. Ce docteur alla donc le
trouver. Tout d'abord il lui demanda poliment comment
se portaient les hommes célèbres dans cet art,
François de Chevriers, seigneur de Saint-Maurice ;
Scevola et Louis de Sainte-Marthe, frères jumeaux ;
Pierre d'Hozier, chevalier du collier ; André Duchêne
et quelques autres dont les ouvrages sur cette matière,
sont connus du monde entier, l'autre répondit qu'il
ne les connaissait pas même de nom. Il continua à
l'entretenir, louant les vieux usages en se félicitant
que les hérauts recommençassent à circuler de l'une
à l'autre partie comme, dans l'ancien temps, enfin il
l'interrogea sur ce que les Français nomment l'émail
qui est un des points les plus importants de l'art héraldique,
c'est un écusson la plupart du temps en or,
couvert d'un émail pour désigner chaque pays, les
hérauts reçoivent le nom qui y est inscrit et doivent
le porter sur la poitrine du coté gauche comme un fermail.
Cet homme ignorant ne savait rien de l'émail
non plus que des autres parties de l'art. D'ailleurs
assez pétulant en paroles, il ne se montra tout à fait
ignorant que dans la science qu'il professait.
« Le docteur envoyé pour l'interroger, revint au
conseil, le prince lui demanda son opinion, il répondit
que l'homme qu'il avait examiné était hardi, plaisant,
mais héraut par le manteau seulement. Ce manteau
même sur les manches duquel était inscrit Alençon,
n'était pas une marque suffisante de sa profession. En
Belgique on ne connaissait pas ce symbole, les trois
fleurs de lys du roi, pour désigner la maison d'Alençon,
qui porte l'écusson de France, vermillonné au
bord [does this signify the tabard had the coat of arms of the Duke of Alençon?].
« Il l'avait questionné sur l'émail, que n'avait pas
même négligé, comme on le voit, dans Commines, le
faux héraut envoyé par Louis XI au roi d'Angleterre
[In this edition here:
Commynes, Philippe de (author),
Godefroy, Denys,
Lenglet Du Fresnoy, Nicolas (eds.)
Mémoires de Messire Philippe de Comines, t.1,
London and Paris: Rollin fils, new ed., 1747,
Ch. VII.,
Comment le Roy fist vstir un simple serviteur d'une cotted'armes ;
avec un esmail, & l'envoya parler au Roy d'Angleterre
en son ost, où il eut tres-bonne response, pp.219ff. (gallica.)
In the nineteenth century this episode seems to have been much known, see
Sismondi, Jean-Charles-Léonard Simonde de,
Histoire des Français,
t.14, Paris: Treuttel et Würtz, 1831
p.446, n.2. (Google Books.)
Scott, Sir Walter,
Quentin Durward, t.3, (Œuvres complètes, t.57),
Liège: Fr. Lemarié, 1829,
p.188, n.1. (French tr.) (Google Books.)
Ségur, Louis Philippe comte de
Histoire de Louis XI,
Paris, Alexis Eymery, 1830,
p.402. (Google Books.)].
enfin [en-: sic] cet individu n'avait aucun diplôme dont les hérauts
avaient besoin jadis dans la guerre où ils étaient
particulièrement employés. C'est ainsi que du temps
de l'empereur Charles Quint, Bourgogne (on désignait
l'homme par ses fonctions) allait trouver François Ier,
roi de France, pour lui assigner un lieu particulier
pour un combat singulier, près du fleuve de la Vidouze,
entre Hendaye et Bayonne, n'obtint pas de
Saint-Bonnet, gouverneur de Bayonne, la permission
de se rendre auprès du roi, avant qu'elle lui ait été accordée
par écrit. [See Ms Chiflet 67 - « Pièces historiques cérémoniales... », recueil formé par Jules Chiflet. Tome III,
« Relation de Bourgongne, roy d'armes, du voyage qu'il fit en France, par ordre de l'empereur Charles V, son souverain seigneur », pour répondre au cartel envoyé à ce monarque par François Ier (1528) - 173).] »
Les membres les plus prudents du conseil voyant
qu'on avait à faire à un personnage inconnu et étranger,
ne jugèrent pas convenable de l'admettre en
présence du prince. Par ordre de ce dernier, il fut
bien traité dans la maison de Charles de Lockenghien,
ancien bourgmestre, commandant des gardes de Bruxelles,
et eut ensuite la permission de partir.
Jean Graciolet mécontent de n'avoir pu signifier
sa déclaration ni au cardinal infant, ni à ses officiers
qui refusaient de l'écouter, attendit ces derniers au
sortir du palais et la jeta à leurs pieds, puis reprit la
route de France. Arrivé à la Rouillée, dernière commune
du Hainaut Autrichien, non loin du village de
La Flamangrie, appartenant au territoire Français, il
fit planter une potence à cent pas de la porte de l'église,
et y attacha une copie de la déclaration de
guerre, pendant que son trompette sonnait la chamade (1).
Il se dirigea de là par Vervins, Laon et Soissons,
vers Château-Thierry, pour rendre compte de sa mission
au roi qui s'y trouvait alors.
C'est ainsi que fut déclarée la guerre de 1635 et
c'est dans cette circonstance que l'intervention du
héraut fut employée pour la dernière fois (2).
Les hostilités ne tardèrent pas à s'ouvrir et la
guerre qui n'avait eu jusque là que l'Allemagne pour
théâtre, répandit bientôt sur nos contrées voisines
des Pays-Bas une série de désastres qui renouvelèrent
au XVIIe siècle, toutes les horreurs du XVIe, et
cela pendant une longue suite d'années, car il ne fallut
pas moins de trente ans pour réaliser le vœu de
(1) Histoire de Louis XIII par le père Griffet, année 1635. [See
1773 ed., t.2, pp.574ff. (Google Books.)]
(2) Eléments de l'Histoire de France par l'abbé Millot, de l'Académie
française, t. III, p. 18. [See, in this edition, t.2, p.345. (gallica.)]
Richelieu et réduire la maison d'Autriche à n'être
plus que l'ombre du colosse qui menaçait l'Europe
de la servitude.
La séance est levée à 5 heures.
Le Président : DE LA PRAIRIE.
Le Secrétaire : l'abbé PÉCHEUR.
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